Port-au-Prince, 14 Mai 2024 (OPS/OMS) - "Des bandits ont envahi mon quartier. On m'a tiré dans le pied alors que j'essayais de m'enfuir", explique John, 34 ans, qui fait partie des nombreuses victimes collatérales de la crise sécuritaire qui sévit dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et qui s'est aggravée depuis le 29 février 2024. La crise a un impact sur un système de santé déjà fragile, entravant l'accès aux soins de santé pour des millions d'Haïtiens et affectant leurs moyens de subsistance. "J'avais un magasin et une moto avant la crise. J'ai tout perdu lorsque j'ai été blessé par une balle perdue", explique-t-il.
En première ligne de la réponse des autorités sanitaires à l'urgence actuelle, et seul hôpital public capable de prendre en charge un grand nombre de patients gravement blessés comme John, l'Hôpital Universitaire de La Paix (HUP) reçoit le soutien de l'OPS/OMS.
Un système de santé sous tension
Le Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP) estime que 39% des structures de santé avec lits sont fermées au cours du mois dernier en raison de l'insécurité ou de pillages dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. Parmi eux, l'Hôpital Universitaire d'Etat d'Haïti (HUEH), le principal hôpital public du pays, n'a pas pu rouvrir ses portes en raison des fréquents affrontements dans ses environs.
L'HUP est donc le seul hôpital public capable de gérer un afflux important de blessés. En première ligne de la réponse d'urgence, le Dr Paul Junior Fontilus, son directeur, a dû rapidement activer le plan d'urgence de l'hôpital pour faire face à l'afflux de patients présentant des blessures graves.
"Nous avons activé notre plan blanc afin de mieux gérer l'afflux de personnes gravement blessées. Notre priorité est de veiller à ce que toutes les victimes reçoivent les soins immédiats dont elles ont besoin. Ce plan mobilise toutes les ressources disponibles et fait appel à notre personnel qualifié pour répondre avec l'urgence et le professionnalisme que la situation exige", explique le Dr Fontilus, directeur de l'HUP.
Pour soutenir son fonctionnement, l'OPS/OMS a déjà fourni à la structure sanitaire plusieurs tonnes de produits médicaux, de quoi assurer les soins médicaux d'urgence et le fonctionnement des autres services pour les mois à venir. L'OPS/OMS fourni également du carburant pour alimenter l'hôpital en électricité. Ces actions ont été menées grâce à l'appui financier du Service d'Aide Humanitaire de la Commission Européenne (ECHO) et du Fonds de réserve OMS pour les situations d’urgence (CFE).
Une nouvelle salle d'urgence ambulatoire, élément clé de la réponse
IInauguré en décembre 2022, le bâtiment, qui fait partie de l'initiative « SMART Hospital » de l'OPS/OMS, a été conçu pour répondre au besoin des autorités sanitaires de disposer d'une infrastructure de santé plus résiliente permettant de fournir des soins post-catastrophe en temps voulu.
"Depuis son inauguration, et plus encore pendant la crise actuelle, cette nouvelle aile de l'hôpital a contribué à améliorer notre capacité de prise en charge des patients. La salle d'urgence ambulatoire nous permet de trier et de stabiliser efficacement les patients, de soigner fractures et plaies et de surveiller l'état de ceux qui en ont besoin dans notre aire d'observation", ajoute le Dr Fontilus.
De nombreux défis à surmonter
Bien que son équipe ait été renforcée par du personnel médical provenant de l’HUEH, désormais fermé, HUP est toujours confronté à un défi en matière de ressources humaines. En effet beaucoup de ses employés sont souvent dans l'impossibilité de se présenter au travail dans un contexte de sécurité tendue dans plusieurs zones de la capitale.
"Nous sommes confrontés à de nombreux défis, et notamment celui de maintenir la continuité et l'accessibilité de nos services. HUP doit continuer à être en mesure de servir autant les femmes enceintes qui viennent ici pour accoucher que les enfants mal nourris qui nous sont amenés. Notre capacité à assurer la santé pour tous est mise à l'épreuve chaque jour", conclut le Dr Fontilus.
La fermeture de l'aéroport international et du port de Port-au-Prince pourrait, si elle perdure, menacer rapidement l'approvisionnement en produits médicaux à l’échelle nationale. Une pénurie potentielle de carburant, qui alimente le générateur fournissant l'électricité à l'ensemble de la structure, se profile également à l'horizon.
