Le choléra est une infection diarrhéique aiguë provoquée par l’ingestion d’aliments ou d’eau contaminés par le bacille Vibrio cholerae. Le choléra reste à l’échelle mondiale une menace pour la santé publique et un indicateur de l’absence d’équité et de l’insuffisance du développement social. Selon les estimations, il y a chaque année 1,3 à 4 millions de cas de choléra, et 21 000 à 143 000 décès dus à la maladie dans le monde.
Principaux faits
- Le choléra est une maladie diarrhéique aiguë, dont on peut mourir en quelques heures en l’absence de traitement.
- Selon les estimations, il y a chaque année 1,3 à 4 millions de cas de choléra, et 21 000 à 143 000 décès dus à la maladie1 dans le monde.
- La plupart des personnes infectées ne manifestent aucun symptôme ou des symptômes bénins, et peuvent être traitées avec succès au moyen de sels de réhydratation orale.
- Dans les cas sévères, un traitement rapide par perfusion de liquide et d’antibiotiques par voie intraveineuse s’impose.
- Les vaccins anticholériques par voie orale sont un moyen complémentaire de lutte, mais ne doivent pas remplacer les mesures classiques.
- Des vaccins anticholériques sûrs administrés par voie orale doivent être utilises conjointement à l’amélioration de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement pour limiter les flambées de choléra et favoriser la prévention dans les zones connues pour être à haut risque.
- Une stratégie mondiale de lutte a été lancée en 2017 avec pour cible dimonuer de 90% des décès dus au choléra.
Symptômes
Le choléra est une maladie extrêmement virulente qui peut provoquer une diarrhée aqueuse aiguë sévère. Les symptômes apparaissent entre 12 heures et 5 jours après l’ingestion d’aliments ou d’eau contaminée2. Touchant les enfants comme les adultes, la maladie peut tuer en l’espace de quelques heures si aucun traitement n’est administré.
La plupart des sujets infectés par V. cholerae ne manifestent aucun symptôme, bien que le bacille soit présent dans leurs selles pendant 1 à 10 jours après l’infection et soit éliminé dans l’environnement, où il peut potentiellement infecter d’autres personnes.
Pour les personnes qui manifestent des symptômes, ceux-ci restent bénins à modérés dans la majorité des cas, tandis que chez une minorité, une diarrhée aqueuse aiguë, s’accompagnant de déshydratation sévère, se développe. En l’absence de traitement, elle peut entraîner la mort.
Historique
Au XIXe siècle, le choléra s’est répandu dans le monde entier à partir de son réservoir original, dans le delta du Gange en Inde. Les 6 pandémies qui ont eu lieu par la suite ont tué des millions de personnes sur tous les continents. La pandémie actuelle (la septième) a démarré en Asie du Sud, en 1961, a atteint l’Afrique en 1971, puis les Amériques en 1991. Le choléra est désormais endémique dans de nombreux pays.
Souches de Vibrio cholerae
Il existe de nombreux sérogroupes de V. cholerae mais 2 sérogroupes seulement, O1 et O139, sont à l’origine des flambées épidémiques. La majorité des flambées récentes sont dues à V. cholerae O1, tandis que O139, identifié pour la première fois au Bangladesh en 1992, a provoqué des flambées dans le passé, mais n’est désormais plus identifié que dans des cas sporadiques et demeure confiné à l’Asie du Sud-Est. La maladie causée par les 2 sérogroupes reste la même.
Les principaux réservoirs de V. cholerae sont l’être humain et les milieux aquatiques, de préférence les eaux saumâtres et chaudes comme les estuaires et certaines zones côtières. Selon des études récentes, le réchauffement climatique crée un environnement favorable au bacille responsable du choléra.
Épidémiologie, facteurs de risque, et charge de morbidité
Le choléra peut être endémique ou épidémique. Une zone d’endémie du choléra est une zone où des cas de choléra confirmés ont été détectés pendant trois des cinq dernières années, une transmission locale étant établie (ce qui signifie que les cas ne sont pas importés). Par flambée/épidémie de choléra, on entend la survenue d’au moins un cas confirmé de choléra, la transmission locale étant attestée dans une zone où le choléra ne sévit pas habituellement.
Dans les pays d’endémie, une flambée peut être saisonnière ou sporadique et le terme de «flambée» s’entend d’un nombre de cas supérieur aux attentes. Dans un pays qui n’est généralement pas touché par la maladie, on entend par «flambée» la survenue d’au moins un cas confirmé de choléra, la transmission locale étant attestée dans une zone où le choléra ne sévit pas habituellement.
La transmission du choléra est étroitement liée à un accès inapproprié à l’eau potable et à des installations d’assainissement. On trouve dans les zones à risque typiques les bidonvilles périurbains, qui ne disposent d’aucune infrastructure de base, ou les camps de réfugiés ou de personnes déplacées, où les besoins minimums en eau potable et en assainissement ne sont pas assurés.
Les crises humanitaires, qui ont notamment pour conséquence l’interruption des systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement et les déplacements de populations dans des camps mal équipés et surpeuplés, peuvent augmenter le risque de transmission du choléra, si jamais le bacille est présent ou s’il est introduit. Il n’y a jamais eu d’épidémie à partir de cadavres de personnes non infectées.
Le nombre de cas de choléra notifiés à l’OMS est resté élevé au cours des dernières années. En 2016, 38 pays ont déclaré un total de 132 121 cas, dont 2420 mortels3. La discordance entre ces chiffres et l’estimation de la charge de morbidité vient du fait que de nombreux cas ne sont pas recensés en raison des limitations des systèmes de surveillance et des craintes de répercussions négatives sur le commerce et le tourisme.
Prévention et lutte
Une approche pluridisciplinaire est essentielle pour prévenir et combattre le choléra, et faire baisser la mortalité. Les mesures utilisées associent la surveillance, l’amélioration de l’approvisionnement en eau, de l’assainissement et de l’hygiène, la mobilisation sociale, le traitement de la maladie et les vaccins anticholériques oraux.
Surveillance
La surveillance du choléra doit faire partie d’un système intégré de surveillance des maladies prévoyant le retour de l’information vers le niveau local et son partage au niveau mondial.
Les cas de choléra sont détectés sur la base d’un diagnostic clinique présomptif chez les patients qui présentent une diarrhée aqueuse aiguë sévère. La présomption est ensuite confirmée par l’identification de V. cholerae dans les échantillons de selles provenant des patients touchés. La détection peut être facilitée par l’utilisation de tests diagnostiques rapides, l’alerte étant déclenchée si un ou plusieurs échantillons sont positifs pour le choléra. Les échantillons sont envoyés dans un laboratoire pour confirmation par culture bactérienne.
Les capacités locales permettant de détecter (diagnostiquer) et de suivre (collecter, compiler et analyser les données) les cas de choléra sont essentielles pour garantir l’efficacité du système de surveillance et planifier des mesures de lutte.
Il est conseillé aux pays affectées par le choléra de renforcer la surveillance de la maladie et la préparation nationale pour détecter rapidement d’éventuelles flambées et intervenir. La notification de tous les cas de choléra n’est plus obligatoire au titre du Règlement sanitaire international. Néanmoins, les événements de santé publique impliquant cette maladie doivent toujours être évalués par rapport aux critères énoncés dans le Règlement pour déterminer si une notification officielle est nécessaire.
Interventions dans les domaines de l’eau et de l’assainissement
Sur le long terme, la solution pour endiguer le choléra (qui sera bénéfique pour toutes les maladies transmises par voie féco-orale) réside dans le développement économique et l’accès universel à l’eau potable et à des services d’assainissement.
Les mesures visant les conditions environnementales consistent notamment à appliquer des solutions durables à long terme pour l’approvisionnement en eau, l’assainissement et l’hygiène, qui soient adaptées aux besoins des populations les plus exposées au risque de choléra. Ces interventions sont aussi de nature à prévenir un large éventail d’autres maladies à transmission hydrique et contribuent à atteindre les objectifs en matière d’éducation et de lutte contre la pauvreté et la malnutrition.
La plupart de ces interventions nécessitent des investissements importants sur le long terme, s’accompagnent de coûts de maintenance élevés et sont difficiles à financer et à pérenniser dans les pays les moins développés, là où elles sont par ailleurs les plus nécessaires.
Traitement
Le cholera est une maladie facile à traiter. On peut guérir la majorité des sujets atteints en leur administrant rapidement les sels de réhydratation orale (SRO). Le sachet standard de SRO OMS/UNICEF est à dissoudre dans 1 litre (l) d’eau potable. Jusqu’à 6 litres de SRO peuvent être nécessaires pour traiter une déshydratation modérée chez un patient adulte le premier jour.
Les patients gravement déshydratés présentent un risque de choc et l’administration rapide de liquide par voie intraveineuse s’impose. Un adulte de 70 kg aura besoin d’au moins 7 l de liquide par perfusion, en plus des SRO, pendant son traitement. Ces patients reçoivent également des antibiotiques adaptés pour raccourcir la durée de la diarrhée, diminuer les quantités de liquide de réhydratation nécessaires et écourter la durée de l’excrétion des bacilles de V. cholerae dans leurs selles.
On ne recommande pas l’administration de masse des antibiotiques, car elle n’a aucun effet sur la propagation de la maladie et contribue à renforcer les résistances.
L’accès rapide au traitement est essentiel lors d’une flambée de choléra. Le traitement par les sels de réhydratation orale doit être disponible dans les communautés, mais les patients doivent aussi avoir accès à des centres plus importants où les perfusions intraveineuses et une prise en charge complète pourront être assurées. Avec une prise en charge rapide et adaptée, le taux de létalité devrait se maintenir en dessous de 1%.
Le zinc est un important traitement d’appoint chez l’enfant de moins de 5 ans, qui réduit aussi la durée d’une diarrhée et peut prévenir des épisodes ultérieurs de diarrhée aqueuse aiguë due à d’autres causes. L’allaitement au sein doit aussi être encouragé.
Promotion de l’hygiène et mobilisation sociale
Les campagnes d’éducation sanitaire, adaptées à la culture et aux croyances locales, devraient promouvoir l’adoption de règles d’hygiène appropriées, comme le lavage des mains au savon, la préparation et la conservation sans danger des aliments et l’élimination en toute sécurité des selles des enfants. Les pratiques funéraires doivent être adaptées pour les personnes qui décèdent du choléra afin de prévenir l’infection parmi les participants aux cérémonies. L’allaitement au sein doit aussi être encouragé.
En outre, pendant les flambées, des campagnes de sensibilisation doivent être organisées et des informations transmises aux communautés sur les risques potentiels et les symptômes du choléra, sur les précautions à prendre pour se protéger contre la maladie, quand et où notifier les cas, ainsi que sur la nécessité de consulter immédiatement lorsque les symptômes apparaissent. L’emplacement des centres de traitement adaptés doit aussi être connu des populations.
L’engagement communautaire joue un rôle clé pour les modifications à long terme des comportements et pour la lutte contre le choléra.
Vaccins anticholériques oraux
Il existe actuellement 3 vaccins anticholériques oraux (VCO) préqualifiés par l’OMS: Dukoral®, Shanchol™, et Euvichol®. Pour les 3 vaccins, 2 doses sont nécessaires pour conférer une protection complète4.
Dukoral® est administré avec une solution tampon qui nécessite, pour les adultes, 150 ml d’eau potable. Dukoral® peut être administré à partir de 2 ans, en respectant un intervalle de 7 jours au minimum et de 6 semaines au maximum entre les doses. Une troisième dose est nécessaire chez l’enfant de 2 à 5 ans. Dukoral® est principalement utilisé chez les voyageurs. Deux doses de Dukoral® confèrent une protection anticholérique pendant deux ans.
Shanchol™ et Euvichol® sont essentiellement le même vaccin produit par 2 fabricants distincts. Leur administration ne requiert pas de solution tampon. Shanchol™ et Euvichol® sont administrés à partir de l’âge d’un an, avec un intervalle de 2 semaines au minimum entre chacune des doses. Deux doses de Shanchol™ et d’Euvichol® confèrent une protection anticholérique pendant 3 ans, une dose unique assurant une protection à court terme.
Shanchol™ et Euvichol® sont les vaccins actuellement disponibles pour les campagnes de vaccination de masse par l’intermédiaire du stock mondial de VCO, qui est appuyé par l’Alliance Gavi. Sur la base des données disponibles, la note de synthèse de l’OMS d’août 2017 sur les vaccins anticholériques dispose:
- que les VCO doivent être utilisés dans les zones où le choléra est endémique, lors de crises humanitaires associées à un risque élevé de choléra et pendant les flambées épidémiques de choléra ; et que la vaccination doit toujours être mise en œuvre parallèlement à d’autres stratégies de lutte contre la maladie;
- que la vaccination ne doit pas perturber la mise en œuvre d’autres interventions de santé hautement prioritaires destinées à prévenir ou à combattre des flambées épidémiques de choléra;
Plus de 15 millions de doses de VCO ont été administrées lors de campagnes de vaccination de masse – dans des zones confrontées à une flambée, des zones à vulnérabilité accrue du fait d’une crise humanitaire et auprès de groupes vivant dans des zones de forte endémie, qu’on appelle les «points chauds».
Mettre fin au choléra: une feuille de route jusqu’à 2030
En octobre 2017, les partenaires du Groupe spécial mondial de lutte contre le choléra ont lancé une stratégie intitulée «Mettre fin au choléra: une feuille de route jusqu’à 2030». La stratégie qui relève des pays vise à faire baisser de 90% le nombre des décès dus au choléra et à éliminer la maladie dans 20 pays d’ici 2030. La feuille de route mondiale comporte 3 axes stratégiques :
- une détection précoce et une riposte rapide pour endiguer les flambées: la stratégie met l’accent sur l’endiguement des flambées – où qu’elles surviennent – grâce à une détection précoce et à une riposte multisectorielle rapide, avec un engagement communautaire, le renforcement de la surveillance et de la capacité de laboratoire, la préparation des systèmes de santé et des fournitures et la mise sur pied d’équipes d’intervention rapide;
- une approche multisectorielle ciblée pour éviter une résurgence du choléra: la stratégie invite les pays et les partenaires à mettre l’accent sur les «points chauds», ces zones relativement peu étendues les plus touchées par la maladie, où la transmission peut être interrompue notamment par une amélioration de l’approvisionnement en eau potable, des moyens d’assainissement et de l’hygiène ainsi que par l’administration du VCO;
- un dispositif efficace de coordination couvrant l’appui technique, la sensibilisation, la mobilisation des ressources et le partenariat aux niveaux local et mondial. Le Groupe spécial offre un cadre solide pour aider les pays à intensifier leurs efforts de lutte contre le choléra en se fondant sur des programmes intersectoriels qu’ils dirigent eux-mêmes et en leur apportant les ressources humaines techniques et financières nécessaires.