Au cours des deux dernières années, le gouvernement haïtien a intensifié les campagnes de vaccination et la surveillance épidémiologique pour lutter contre les maladies évitables par la vaccination (MEV) dans un contexte de graves problèmes humanitaires et de sécurité.
— Port-au-Prince, Haïti, Avril 2025 —
« En Haïti, les gangs contrôlent environ 85% de la zone métropolitaine de Port-au-Prince et d'autres localités voisines », a déclaré le Dr Oscar Martin Barreneche, représentant de l'Organisation panaméricaine de la Santé (OPS) en Haïti. « Cela rend très difficile la mise en œuvre de tous les services de santé, y compris la vaccination. Cependant, le financement canadien a permis de soutenir avec succès des services de vaccination de routine essentiels pour les enfants et les femmes enceintes ».
Depuis 2022, le Ministère de la Santé Publique et de la Population d'Haïti (MSPP) a reçu un soutien financier de l'initiative canadienne CanGIVE afin d'améliorer l'accès aux vaccins pour les populations vulnérables. Ces fonds ont été acheminés par l'intermédiaire de l'OPS, qui a également fourni une assistance technique aux services de vaccination.
Pour mesurer l'impact, la couverture vaccinale avec la première dose du vaccin pentavalent contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, l'hépatite B et l'Haemophilus influenzae type b a augmenté de 22 points de pourcentage en 2023 et de 4 points en 2024 par rapport à 2022. La couverture par la troisième et dernière dose du vaccin pentavalent a augmenté de 23 points de pourcentage en 2023 et de 10 points en 2024 par rapport à 2022.
« L'extension des services de vaccination et l'augmentation de la couverture vaccinale sont des priorités nationales pour le gouvernement haïtien », a déclaré le Dr Martial Beneche, directeur du Programme élargi de vaccination. « Notre objectif est d'assurer le plus haut niveau de protection des enfants de notre pays contre les épidémies potentielles ».
Dans le cadre de l'intensification de la vaccination, le MSPP a lancé des opérations dans tout le pays pour « rattraper » les taux de vaccination érodés, qui ont baissé avant et surtout pendant la pandémie de COVID-19. L'année dernière, au moins 421 000 enfants ont été vaccinés avec le vaccin pentavalent. Pour lutter contre les épidémies récurrentes de diphtérie, plus de 343 000 enfants ont été vaccinés contre cette maladie.
La gravité de la crise sécuritaire continue de rendre les opérations de vaccination difficiles. La zone métropolitaine de Port-au-Prince et la région basse du département de l'Artibonite ont été particulièrement touchées, avec des personnes cherchant refuge dans des camps improvisés, y compris des enfants et des femmes enceintes. Dans certaines zones, comme le quartier de Carrefour à Port-au-Prince, l'OPS et le MSPP doivent travailler avec les vaccinateurs de la communauté car l'accès aux personnes extérieures est bloqué par des gangs.
Néanmoins, « il est très important de renforcer la vaccination de routine, en particulier dans les zones reculées où de nombreux enfants n'ont pas reçu de doses ou n'ont pas terminé leur vaccination », a déclaré Yolande Gabriel, une soignante du centre médical Felisane, dans le département du Sud-Est d'Haïti. « Parfois, les parents n'ont aucun moyen d'emmener leur enfant dans un centre de santé. L'envoi d'équipes sur le terrain permet donc à ces enfants de recevoir leurs vaccins directement dans leur propre localité. »
Pour améliorer les compétences des personnes chargées de la vaccination, quelque 105 professionnels de la santé, dont 84 femmes, ont reçu une formation soutenue par l'OPS pour devenir des formateurs en normes et protocoles de vaccination. Les formateurs ont ensuite participé à la formation en cascade de 395 prestataires de soins de santé de première ligne travaillant dans des établissements sur le terrain.
La crise sécuritaire a également eu un impact sur certaines activités critiques de surveillance épidémiologique. Par exemple, les équipes de supervision du MSPP ne peuvent plus accéder aux sites de collecte des eaux usées de Cité Soleil à Port-au-Prince en raison de l'activité des gangs.
Mais avec le soutien du Canada, l'OPS a fourni des moyens de transport pour l'investigation épidémiologique des cas suspects de MEV dans 341 établissements de santé et communautés dans huit des dix départements d'Haïti. L'OPS a également assuré le transport pour la formation de 77 professionnels de la surveillance des maladies infectieuses virales dans le département du Centre et 47 dans celui de l'Artibonite.
« Nous recherchons des cas de diphtérie, comme celui qui a été récemment traité par l'Équipe Départementale d'Investigation et de Réponse (EDIR) », a déclaré le Dr Jose Raphael, assistant épidémiologiste au Département de la Santé du Nord-Est. « Dans le cadre de la surveillance épidémiologique, nous surveillons également la rougeole, la rubéole et le syndrome de rubéole congénitale chez les enfants de moins d'un an, ainsi que la paralysie flasque aiguë chez les enfants de moins de 15 ans. »
Grâce au financement de CanGIVE, l'OPS a fourni un soutien logistique pour la livraison du COVID-19 et des vaccins de routine depuis Port-au-Prince vers les 10 départements haïtiens. En collaboration avec le MSPP, l'OPS a fait appel à des transporteurs locaux qui ont pu traverser les bastions des gangs pour atteindre le nord du pays. Pour les régions du sud, l'OPS a trouvé un partenaire local qui a utilisé des bateaux pour transporter les vaccins et les fournitures de vaccins depuis Port-au-Prince.
« La situation en matière de sécurité continue de rendre difficile l'accomplissement des tâches de base », a déclaré le Dr Barreneche. « Mais, grâce au dévouement, à la persévérance et au soutien de nos partenaires, nous avons pu aider Haïti à protéger la santé et le bien-être de ses citoyens. »
